TIMES SQUARE est une pièce de théâtre dont l’intrigue psychologique capte l’intérêt du spectateur.
Elle est écrite par CLEMENT KOCH, né en 1970, au style intéressant, car varié entre l’ironie qu’il déploie, sur l’enseignement désuet du théâtre dramatique et l’humour noir pour amorcer une réflexion, plus large, de fond sur le théâtre. Le tout est ponctué de blagues privées (private jokes) de la part de la comédienne débutante qui ne peut pas encore avoir confiance en elle-même, Sara Pump, car elle ne sait rien et a besoin de cours d’art dramatique. Tout bon mot est à prendre pour aider à faire se survivre à lui-même Matt Donovan, un comédien, qui “n’est plus dans le match” et n’a plus confiance en lui, maniaque dépressif, “rouillé sur les effets comiques” dira-t-il de lui-même et de ses remarques désobligeantes qui tombent à plat ou qui blessent souvent les deux petits jeunes qui l’entourent (Sara et Tyler) Tyler, que Matt a pris sous son aile, se révélera avoir un rôle important puisqu’il est CLEMENT KOCH !…
Le personnage décalé n’est pas non plus, tendre, avec son frère qui essaie de l’aider matériellement, avec tact et gentillesse. Sans oublier le whisky que l’acteur à succès GUILLAUME de TONQUÉDEC est obligé d’ingurgiter tout au long de la pièce puisque Matt Donovan se laisse aller à la boisson.
Le charme de la pièce est dû à l’écriture et au contexte de l’action (la mise en scène est de José Paul qui y contribue intensément) qui se situe dans un appartement typique du célèbre quartier de Times Square, dans Manhattan à New York qui est celui de l’épate, des quarante théâtres (comédies musicales)…sans doute est-on, selon le choix de l’auteur, dans les années actuelles plutôt récentes, puisque Tyler, a été pilote et qu’il revient de la guerre en Afghanistan ; ce qui “a interrompu le fil de sa conversation”, car depuis, le pauvre, bégaie, mais, cela aurait pu être aussi bien la guerre du Vietnam (1968), cela aurait pu être le temps des splendeurs de Manhattan et de son incroyable liberté qui a donné avec une base d’apprentissage au théâtre, le cinéma puissant de la Californie, Hollywood ou même Broadway puis, dans les années 70, la formation pluridisciplinaire comme dans le film Fame qui m’a tant fait rêvée : théâtre, art dramatique ou cinéma, danse et musique, étaient enseignés pêle-mêle aux jeunes Américains sûrs d’eux, formés à l’Art pas seulement dramatique. L’enseignement comme le fait comprendre Matt Donovan laisse une grande part à la vie, au corps, au souffle, à la respiration, à la diction “politesse de l’acteur”, car il ne s’agit pas de “ruminer son texte ni de reprendre chaque réplique” enseignera-t-il à Sara Pump qui doit réussir une audition pour laquelle on lui demande de déclamer dans le rôle de Juliette la fameuse tirade du balcon à son Roméo : “Roméo, Roméo pourquoi es-tu Roméo?”. Tyler lui donne la réplique quand il n’essaie pas de gagner un peu d’argent en prenant l’habit de Bunny ou Buzz l’Éclair personnages de WALT DISNEY qu’il affectionne. Ces personnages déguisés, dans le quartier de Times Square, depuis 1937, déambulaient encore récemment, quartier de la 7e avenue.
Aux antipodes de la rue animée, se situe l’ambiance régnant dans l’appartement de notre acteur dramatique que Sara souhaiterait voir redevenir vivant alors qu’il ramène à son propre cas les passages de l’œuvre de Shakespeare “le serment me tue en me laissant vivre” allusion à son amour du théâtre dont il dit qu’il est pour le comédien ” un immense terrain de jeu qui s’ouvre en nous et si vous le percevez (dit-il à Sara Pump), vous “déchirerez” à l’audition”. Au passage, il égratigne, lorsqu’il les mime, les jeunes des années 2000 et leur langue de la rue, argotique. Alors… ironie dérisoire sur le théâtre, son apprentissage…, de la part de l’auteur Clément KOCH de cette pièce de théâtre susceptible de décrire le théâtre d’inspiration actuelle anachronique qui pioche partout et ne crée rien de nouveau, ou bien, désabusé, il aurait tout de même, cette nostalgie de cette Amérique de 1935? Pleine de charme, celle de Steinbeck, sur la côte californienne et sa vie de bohème, de ces personnages déroutants, seuls, mais formant une équipe dans un loft qui n’est pas la maison de l’Amérique profonde ni celle de Tortilla Flat, mais qui a le goût des écrivains américains et le charme désuet du passé. En ayant laissé des empreintes sur un écrivain français, on ressent ces traces appartenant au passé, hélas, déjà lointaines quand on a perdu l’authenticité, mais que le héros de l’histoire, Tyler, essaie de communiquer !
- Véronique VESVAL.
ID Canada / ISSN 2563-818X (En ligne) – ISSN 2563-8181 (Imprimé)