Serait-il temps d’appeler notre Méphibosheth?

Serait-il temps d’appeler notre Méphibosheth?

  • Par Jean Willer Marius

La Bible ne tarit pas d’éloges au sujet de l’amitié. Si le plus bel hymne tombe sous la plume de l’apôtre philosophe dans sa lettre aux corinthiens, il n’en demeure pas moins vrai que l’Ancien Testament a su nous gâter de récits d’amitiés indéfectibles.

Le lien qui unissait David et Jonathan était tellement puissant qu’il a survécu au-delà de la mort et du tombeau. C’est en pensant à cette amitié comme on en trouve peu que le roi David appelle son intendant Tsiba pour lui demander si par hasard quelqu’un aurait échappé à la tragédie qui avait frappé la maison de Saul, son ennemi juré, celui qui tenait le sceptre qui devrait le foudroyer si Jonathan ne fût intervenu pour sauver son ami, du courroux de son propre père.

Tsiba s’empresse de rafraîchir la mémoire du roi sur le fait que dans un coin reculé du royaume vivait un handicapé majeur à un point tel qu’il ne puisse même pas se déplacer, c’est un lieu où la misère est réelle et la pauvreté humiliante.

La hâte avec laquelle le roi envoie chercher Méphibosheth devient légendaire. Va Tsiba, cours, vole et dis à Méphibosheth qu’avec lui aujourd’hui je dois m’entretenir, qu’à ma table dorénavant  il se gavera, que dans mon palais désormais il demeurera, car je dois honorer la mémoire de mon ami Jonathan en même temps que la promesse que je lui avais faite de veiller sur les siens le temps de mon vivant.

Tout ce que la vie lui a volé lui sera restitué, il ne connaîtra plus jamais la misère, parole du roi. Le dernier de la maison de Saul devient finalement hôte spécial au palais du roi comme symbole vivant d’une amitié éternelle.

Cet enfant de sang royal que l’ingratitude et le désamour avaient relégué au rang canin revêt les vêtements royaux, son rang lui est de nouveau reconnu, sa vie ne sera plus jamais la même depuis que l’amour l’avait arraché des griffes du désespoir, depuis cet adieu à lodebar consécutif à l’appel d’un roi compatissant.

De telles amours s’amenuisent parce que l’iniquité s’est accrue, pourtant comme une allumette qu’on craque dans le noir, certains continuent de manifester un intérêt reconnaissant envers leurs bienfaiteurs ainsi que leurs descendants.

La dualité des actions ne cessera donc jamais d’imposer un camp, de rappeler aux souvenirs sélectifs ce Méphibosheth qui patauge dans l’indigence alors que ses parents ont été bons envers plus d’un, que la dette envers lui doit être payée sans délai.

Tendons-lui donc une main secourable, il n’attend que ce clin d’œil pour voir la lumière et s’ouvrir à la plénitude d’une vie abondante, que chacun appelle son Méphibosheth en espérant que Dieu me dote d’assez de courage et d’humanité pour appeler le mien.

ID Canada / ISSN 2563-818X (En ligne) – ISSN 2563-8181 (Imprimé)