Le Brave, le Lâche et le Frustré par Jean Willer Marius

Le Brave, le Lâche et le Frustré par Jean Willer Marius

  • Aspirant Ministre du Bonheur des Haïtiens.

Lorsque l’heure du bilan a sonné, l’homme se souvient surtout et avant tout des combats menés pour la pérennisation de ce qui a été ses convictions motivations et réalisations. Les batailles qu’il a dû livrer pour sauver ce qu’il avait considéré comme valant la peine de se battre pour. Et de là étant, il se rend compte que certains de ses combats étaient inutiles et perdus d’avance quand, au nombre de ses adversaires, figuraient : des lâches, des frustrés.

Le brave est l’adversaire contre lequel on devrait avoir à se battre toute sa vie. Un combat livré contre un brave n’est jamais perdu, quelle qu’en soit l’issue. Si on est vainqueur, on a dû se dépasser pour arriver à bout d’un adversaire digne et donc on en sortira aguerri, renforcé, prêt à livrer de nouveaux combats et les gagner. Vaincu, on aura appris de nouvelles techniques, car le brave combat dans les règles de l’art. Mort la postérité vous fera la plus noble épitaphe qu’un combattant puisse espérer : died fighting. C’est un gentleman qui sait abandonner quand il réalise qu’il lui est impossible de gagner et sait reconnaître et féliciter la victoire de l’adversaire. Il n’utilise pas d’arme non conventionnelle dans la bataille, car c’est un guerrier qui a le plein sens de l’honneur. À cet effet, les samouraïs japonais, les plus braves d’entre eux tous savaient se jeter sur leurs épées en cas d’échec patent. Le fer frappe encore tant que la main est capable de le tenir et la lame écachée, à force de frapper, continue de faire ce pour quoi elle a été forgée. Quel combattant admirable !

À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire; disait l’autre. Le lâche est le pire des adversaires, non seulement il nous rend médiocres parce que nécessitant peu de force pour en venir à bout. Il aime passer par la tangente pour éviter les combats et paraître quand même grand. Il n’accepte jamais sa défaite même dans sa fuite. Ce n’est donc pas rare de l’entendre exprimer, à coup d’arguties, comment il a failli perdre. Il aime avoir à ses côtés d’intrépides comparses et comme une sangsue, sa force apparente lui vient des autres. Livré à lui-même, il se fourvoie dans les méandres de sa réelle faiblesse. Incontournable, on ne sait jamais réellement quand on l’a vaincu. C’est un lâche, il n’a pas d’honneur et tous les moyens sont bons pour lui de refaire surface, quitte à fausser complètement les pistes et corrompre les données. C’est un combattant redoutable en ce sens que toute bataille contre un lâche est perdue d’avance, car lui, il ne combat pas, il se cache, il se dérobe, et ne sait pas reconnaître sa défaite.

Entre le brave et le lâche se trouve le frustré, le pire des combattants, dont la devise est : Tuer ou être tué. Citoyen d’un demi-monde et autodestructeur; dépourvu d’honneur, de dignité et de raison de vivre, il n’aspire qu’à mourir. Rendant le monde entier, sauf lui-même, responsable de ses échecs, le frustré s’apparente facilement à un fou, car ses analyses ne sont crues que de lui-même. C’est un adversaire dangereux qui ne sait pas abandonner un combat. La seule issue d’un combat livré contre un frustré c’est la mort. Ou il tue ou il se fait tuer, car pour lui toute autre option est non négociable. C’est un rusé qu’il ne faut jamais croire sur parole. Bourreau de son état, il veut se faire passer pour victime et tous ses déplacements et tactiques vont dans le sens de ses intérêts immédiats, souvent imperceptibles.

Dès qu’il s’agit pour lui de gagner coûte que coûte, il peut même arriver, comble d’inélégance, à nier les règles établies par les juges et définir des stratégies jamais vues auparavant. C’est un frustré qui croit que tout le monde lui en veut, et, tout le monde en jalouse de son sort, donc il doit se battre jusqu’à la dernière goutte du sang versé, que ça soit le sien ou celui des autres il est sans scrupule, car sa réalité à lui diffère de la normale. Il a peur de tout le monde, même de ses amis, et préfère s’entourer, à prix fort, de nouveaux gardiens de sa petite personne qui l’abandonneront au premier réel danger. Ce qui fait de lui un adversaire malade, profondément atteint.

«Suivez mon regard…»